Jean-Paul Delfino, ancien journaliste, a
quitté se profession pour sa consacrer entièrement
à l'écriture de romans. Auteur à l'heure actuelle
de trois romans noirs parus chez Métailié, il nous
gentiement accordé un peu de temps pour répondre à
nos questions, essentiellement à propose de son dernier roman
"De l'eau dans le grisou", troisième volet
des aventures du "Vieux Switch".
Livrenpoche :
Votre héros, Vieux Switch, n'a que 34 ans. Pourquoi
vieux ? C'est pourtant
proche de votre âge (rire) ?
J.P. Delfino : J'ai choisi
ce qualificatif en référence à un livre
qui m'a bouleversé et fait partie des repères
qui marquent une vie : l'Attrape-coeur de JD Salinger. Dans
ce roman, ce tic de langage participe de la structure de l'oeuvre
: Vieux Spencer, Vieille Phoebe, etc. Outre ce qualificatif,
mon héros en a gardé aussi une " vieille
" vision désabusée de ce monde !
|
|
De
l'eau dans le grisou
- Métailié Noir N°17
185 Pages - 2001
ISBN : 2864243709
|
L'ensemble des protagonistes ne
sont connus qu'au travers d'un psudonyme, d'un seul nom ou prénom.
Pour quelle raison ?
J.P. Delfino :
Parce qu'ils figurent directement une qualité, un trait de
caractère particulier, du moins en ce qui concerne le Marseillais.
Lui, symbolise l'image de ce que les non-Phocéens se font
de Marseille. Un mélange burlesque de Raimu et Fernandel,
avec un zeste de Pagnolade !
Bernie, lui, image la facette sombre de Marseille. Il est tragique,
silencieux, hanté de fantômes. Pour définir
Marseille, il faut savoir passer
du cliché du fort en gueule à la facette grecque et
noire de Phocée.
Quant à Vieux Switch, il a un nom et un prénom : Jonh
Léopold Switch !
En quoi vous vous ressemblez, vous et
votre personnage ?
J.P. Delfino : Je me retrouve - ou je me livre, c'est
selon ! - au travers non pas de Vieux Switch, mais bien de mes trois
personnages !
Tout au long de vos livres, vous sortez des comparaisons et des
expressions à dormir debout. Où allez-vous chercher
tout ça, c'est hilarant!
J.P. Delfino : Merci pour le compliment ! La littérature,
selon moi, ne doit pas se restreindre à un travail de rat
de bibliothèque qui aurait pour meilleur ami un psychalyste
freudien. C'est à dire : être cultivé n'est
pas gage de réussite littéraire, et la description
effrénée de son nombril par l'auteur larmoyant ne
conduit pas non plus à une littérature de qualité.
Le rire fait partie de la littérature. il devrait en faire
partie, en tous cas, selon moi. Voltaire, Rabelais, Boris Vian,
Prévert, Audiard et les autres sont là pour le confirmer.
Mais hélas, littérature et burlesque ne font pas souvent
bon ménage dans les salons pompeux du sixième arrondissement
parisien.
Les expressions, elles, sont inventées ou puisées
à la source de la vie.
L'argot, comme pour l'armée, constitue l'éclaireur
de la langue française. Ce qui est littérairement
incorrect aujourd'hui passera dans dix ou vingt ans dans le langage
chatié...
Vous attaquez directement beaucoup de monde, tout y passe, la
vache folle, le sang contaminé, les vaccinations et bien
sûr l'eau, thème principal de "de l'eau dans le
grisou". Vous n'avez pas peur et n'avez pas eu des retours
sérieux des gens concernés ?
J.P. Delfino : Bien sûr, mes romans ne plaisent
pas à tout le monde. Mais, à l'inverse du journalisme,
le danger est différent. Un journaliste qui écrit
un article où il attaque l'eau potable est potentiellement
en danger. Menaces, licenciement, placard, sévices : celui
que son article a gêné, et selon son pouvoir, peut
tout mettre en oeuvre pour que ce journaliste soit mis hors d'état
de nuire.
En revanche, l'auteur, une fois que son livre est sorti, est inattaquable.
Lui faire du mal ne servirait qu'à promouvoir le livre incriminé,
lui
organiser une campagne de presse à retentissement. C'est
d'ailleurs pour
toutes ces raisons que j'ai choisi d'arrêter d'exercer ma
profession de
journaliste !
L'humour dans vos livres est-il une arme
pour dénoncer un certain nombre de ces choses graves ?
J.P. Delfino : La meilleure des armes ! Toutes proportions
gardées, c'est par l'humour que bon nombre de créateurs
ont attaqué les pouvoirs en place. Des exemples ? La Fontaine,
les Guignols, Frédéric Dard, Villon, Edmond Rostan,
Brassens, Alphonse Allais, Courteline, et la liste est encore longue
!
Pour ma part, je me considère un peu comme un fou. Non pas
le Fou du Roi, mais la mouche du coche, la petite pierre dans le
soulier de la société.
Vous décrivez souvent Marseille comme une belle femme
et faites aussi référence à Aix. Parlez nous
de votre amour pour ces villes et cette région.
J.P. Delfino : Marseille ne se raconte pas. Et c'est
sans doute la raison pour laquelle tant d'auteurs, moi y compris,
essayons de rendre un peu de sa chair et de son parfum. Si Marseille
est une putain généreuse et ouverte à tous,
Aix-en-Provence est une bourgeoise surannée, encore capable
toutefois de quelques coups de reins à faire pâlir
bien des courtisanes !
Au cours du livre, les personnages se
retrouvent chez les "Camisards de la Terre". Est-ce que
la loi du "Plaisir Absolu" est pour vous quelque chose
d'envisageable et fait partie de vos fantasmes :) ?
J.P. Delfino : Qui n'aimerait pas cela, une société
où l'objectif de tous est de se faire du bien ? En y repensant,
je retrouve dans cette société un peu de l'abbaye
de Thélème, chère à Rabelais...
Pourquoi avoir choisi de nommer vos chapitres
par "Goutte", "Mauresque" et "Verre".
Une allusion à la "bonne descente" de vos personnages
! :)
J.P. Delfino : Oui, sans aucun doute. Et sans doute
aussi pour désacraliser la littérature, cette vieille
dame impotente qui aurait bien besoin d'un élixir de jeunesse.
Mais les romanciers actuels en sont-ils encore capables ?
Ayant lu les 3 romans dans l'ordre chronologique
de leur parution, j'ai trouvé qu'ils n'évoluaient
qu'en bien. Pouvez-vous nous dévoiler les prochaines aventures
du vieux Switch et de ses acolytes ? Date de Parution ?
J.P. Delfino : En septembre, Chair de Lune (Editions
Métailié Grand Format) constituera mon premier pas
dans le domaine de la littérature blanche, en opposition
à la noire qui désigne les polars. Ce livre raconte
une grande histoire d'amour entre deux jeunes adolescents et se
situe dans les années 1970, dans les quartiers ouest de Marseille.
Le prochain Vieux Switch sortira pour le premier trimestre 2002
et son seul
titre raconte son histoire : Embrouilles au Vélodrome...
Benjamin DUQUENNE
Le résumé :
"Si j'avais su, j'aurais pris des bains
de boue avant de quitter Marseille. Ca m'aurait donné un
avant-goût de l'éternité..." "Le Marseillais"
découvre les joies de la spéléo en compagnie
de Vieux Switch et de Bernie. Sauf que c'est au fond d'un de ces
puits de mines désaffectées qui trouent le sous-sol
des Cévennes et qu'à la surface, des hordes de Terminators
- les CRS nouvelle mode - s'apprêtent à les déloger.
C'est qu'ils sont "terroristes", nos trois Pieds Nickelés.
Vieux Switch, après avoir rendu public le scandale de l'eau
contaminée, a dû se cacher avec ses deux compères
en plein coeur de la Cévenne sauvage et indomptée.
Ce que nous en pensons :
Plus aboutit que les autres, "de l'eau
dans le grisou", de par son histoire et ses protagonistes nous
font rentrer dans un monde où réel et imaginaire se
côtoient. Des trois, celui ce est notre préféré,
en attendant la suite...
Notre note : 4.5/5
Bibliographie aux éditions métailié
:
L'îles aux femmes
|
Tu touches pas à
Marseille
|
Il y a Vieux Switch, bronzage, lin
noir, léger spleen et gros appétit sexuel, Bernie,
colosse sentimental rescapé en pas très bon
état des jungles vietnamiennes et le Marseillais, amateur
de Pastis et de filles, pratiquant une langue française
«énaurme» retouchée du côté
de Marseille.Trois héros sortis tout droit d'une bande
dessinée qui se lancent à la recherche d'une
petite fille enlevée et vont affronter une colonie
de femmes guerrières.
Notre note : 3/5
|
Les politiciens sont devenus fous,
ils ont vidé le Vieux Port pour y installer un bateau
de guerre de la mafia russe, et ils ont aussi fermé
le bar du Marseillais. Vieux Switch et Bernie arrivent à
la rescousse. Il y a de la bagarre et c'est bon, il y a des
méchants très méchants et puis des méchants
pas si méchants parce qu'ils ont une fille de dix-huit
ans si jolie et si innocente, il y a des politiciens qui retrouvent
leur conscience et il y a surtout une langue burlesque, riche,
"énaurme". Bref, c'est la suite de L'Ile
aux femmes.
Notre note : 3.5/5
|
|
|
|